Chère Mxxxx,
"A vrai dire, si vous pouviez réduire votre écrit à sa plus simple expression, le fond de votre pensée en serait clarifié".
"L'école reste l'école et on ne soigne pas dans ses bâtiments. Pas de clinique en son sein" (sic), me dites-vous dans votre message.
Merci de votre réponse et de votre humour.
Mais quand même alors en fait si j'entends bien, comme vous avez du mal à lire le sens de ce que je dis, vous vous rabattez sur la forme et il me
semble que de cette place de maître évaluateur vous ne me mettriez pas une bonne note de composition française? Heureusement que depuis belle lurette je ne me laisse plus mettre en place
d'élève.(sourire) par qui prétendrait le faire d'une position de maîtrise.
Désolé pour vous qu'il soit inévitable d'avoir parfois difficilement à y mettre du sien pour me lire (c'est quand même un peu fait pour) mais je
vous assure que pourtant à ce ... "sujet", je m'efforce de chercher le bien dire. Sans pour autant y réussir assez..au goût de certains, parfois. Question de résonance et de retentissement
peut-être...
Mais pour ma part, ma pensée concernant clairement la nécessaire place "ex-sistée", (sortie du lieu de la seule pédagogie) du psychologue à l'école comme partout ailleurs, s'est consolidée au fil du temps, et plus que jamais affirmée. C'est très clair en ce qui me concerne.
Mais voilà, mon "bien dire", c'est à dire celui qui s'approche au mieux de la vérité de ce que je désire dire, comme le bien dire en général d'ailleurs, en ce qu'il est le produit brut d'une élaboration intérieure, n'est pas nécessairement de l'ordre artistique nœud papillonné du beau dire. Ni du dire bien qui certes aurait tendance en effet à passer pour moi au second plan par rapport à ce qui me vient. (Ce que je désire) D'ailleurs, j'ai l'habitude, vous n'êtes pas la seule de la "maison" à réagir à partir de la forme qui ferait barrage au fond.
Effectivement je le déplore pour vous et vous avez à l'évidence super "raison"... (sourire) Je ne suis pas écrivain et je
n'ai aucun talent d'écriture, ce n'est pas mon but. Mais je n'en suis pas écrit vain pour autant. Et, comme aurait pu le dire Coluche, ce n'est surement pas une "raison" pour me taire.
Si l'on croit comme vous et comme souvent encore dans les établissements scolaires et dans leur administration, que l'Autre écoute du psychologue est seulement une démarche de soin. Que la méthode clinique est thérapeutique. Qu'elle est réservée, par mise en équivoque du signifiant clinique pris comme domaine et non plus comme méthode, au secteur médical ou médicalisé. Que l'Autre scène, celle de la subjectivité, ne concerne que les malades et leur soin. Qu'en secteur soignant la psychologie est "clinique" et qu'en secteur scolaire la psychologie est "scolaire" ne prenant en compte que le "Moi" et même que la partie qui serait "scolaire" du Moi. Qu'elle est une spécialisation ... pédagogique parmi d'autres. Alors, les choses de la division subjective restent simples, a-conflictuelles, linéaires et claires. Ça ne paraît plus carburer à l'"alambiqué".
Ça ne mobilise plus aucune division du psychisme.
Le Moi reste Maître ... en son logis scolaire et l'inconscient est renvoyé à l’hôpital ou au secteur psychiatrique pour s'y faire "traiter", voire parfois actuellement, sous l'effet d'une certaine politique de santé ... "maltraiter".
Mais ça serait dommage. Le psychologue, même dans les écoles je vous assure, a pourtant aussi et bien que cela soit très souvent refusé, "controversé", refoulé ou dénié, tout à fait officiellement, régulièrement et légitimement, tout comme ailleurs, mission clinique d'écoute et de suivis psychologiques.
Alors pourquoi devrait-il là, selon vous semblant partager en cela la "comme-unauté" de pensée institutionnelle, dans ce secteur scolarisé, veiller réductivement à ne maintenir cette écoute que dans l'espace "pédagogiquement correct" et purifié du Moi et de la partie de la division psychique qui se situe pour ainsi dire "au-dessus de la ceinture"?
Car dés que l'on écoute, vous savez bien que ça parle, et que, ce faisant, ça travaille et que ça opère des modifications.
Cette écoute même a fonction de médiation symbolique et symbolisante. Le reste, là d'où proviennent les forces pulsionnelles vives qui nous animent, celui qui précisément "cause" et donc l'Autre partie, celle que Freud a nommé l'"autre scène", l'ex-time, pourquoi devrait-il si vite être conjuratoirement l'objet d'une prescription d'aller s'exprimer pour se faire traiter ailleurs? Un psychologue (voulu par vous? Pourquoi?) castré de sa fonction, à l'écoute tronquée et raccourcie alors? Mais pour quels "dieux obscurs" ce sacrifice? Votre Surmoi sadique jouissif? Celui de la République? Celui de la Pédagogie? Celui du Ministère et de l'Inspection Générale? Pourquoi ne pas permettre le bout de chemin qui peut bien des fois, je peux avec bien d'autres, en témoigner, ne se faire que là, à l'occasion de la chance de cette rencontre. Un chemin qui peut bifurquer et conduire, il est vrai alors, à la poursuite décidée d'un long travail clinique ultérieur, ailleurs?
Si certes on ne "soigne" pas dans l'école (et pourquoi pas?), on y exerce néanmoins pourtant la médecine (de santé "scolaire")
puisqu'il y a des médecins de l'éducation nationale et on y exerce néanmoins pourtant aussi une activité paramédicale de soins infirmiers puisqu'il y a des infirmiers et infirmières "scolaires",
y ayant, par ailleurs ("aussi?), une fonction infirmière d'écoute et de soutien ... psychologiques.
Pourquoi paradoxalement selon vous alors les uns et pas les autres, dans ce même lieu pédagogique et soi-disant non soignant?
Il vous a semblé que mes propos soulignaient comme vous dites" à la fois le bien-fondé de la présence d'un psychologue scolaire dans les
établissements tout en réfutant son "existence": il est sans être".
Si effectivement on conçoit administrativement l'école habitée par des sujets au psychisme plat et à la subjectivité non divisée, on ne peut alors
pas clairement percevoir que même dans un institution où le moi y est certes très important, mais pas seul ni Tout, le psychologue devrait pouvoir, comme ailleurs, sauf à y être alors en
effet réduit et aseptisé en un simple alibi inutile comme instrument supplémentaire de "bilans" d'orientation et d'évaluation, être dans une position ex-centrée qu'on peut
appeler avec Lacan une place d'ex-sistence. Sur le même plan "Autre" que celle du sujet dont il se met à l'écoute.
C'est à dire, pour faire plus simple et court, que même dans l'école, lieu de la pédagogie et de l'enseignement, le bureau du psychologue, sauf
détournement ou domestication, reste une espace non pédagogique de déploiement intime et confidentiel de la subjectivité. Pour les enfants, pour les jeunes, pour les
familles et pour les ... "collègues".
Comme je le disais, tout cela pour moi c'est du passé. Mais du passé qui m'apparaît toujours de l'ordre d'un immense et stupide gâchis!
Je vous invite à vous reporter au sujet de la fonction clinique du psychologue même en milieu non soignant ni thérapeutique (si si il y en a même
dans la police qui y pratiquent de l'écoute ) à :
- l'ouvrage de mes amis et anciens collègues vauclusiens Neri, Tramoy et Farré intitulé : "Psychologie clinique dans l'institution
scolaire". C'est paru aux Presses Universitaires de Grenoble dans la collection "Psychopathologie clinique" sous la direction du professeur Claude Miollan.
- un article que j'ai "commis" en 1995 intitulé " l'Autre écoute du psychologue : une éthique du Sujet et une envers de la pédagogie" publié dans
Euroéthique : actes des premières rencontres professionnelles des psychologues de l'Europe du Sud.
- un article développant cette notion d'ex-sistence qui vous est apparu finement et avec justesse dans mes propos comme de l'ordre du "il est sans
être" qui s'intitule justement " L'ex-sistence scolaire du psychologue : une nécessité à venir encore dans l'antichambre d'un passé qui tarde à prendre rang". Cet article a été publié sous mon
nom dans Psychologues et Psychologies", le bulletin du Syndicat National des Psychologues N° 19 en février 1996.
Voilà, j'espère avoir peut-être un peu trop vivement contribué à vous clarifier ma perception réfléchie de ces choses.
Désolé que ça ne puisse être plus linéaire et simple.
Bien à vous
M. B.
Écrire commentaire